1884, le trois-mats grec Franz Covacevich
Petit trois-mâts barque en bois arrivant au Havre vers 1890, le Franz Covacevitch pouvait être
Le pilote Floury a trouvé un grand trois mâts grec abandonné en par son équipage. Il est chargé de froment.
Voici les détails qui nous sont communiqués sur cette curieuse trouvaille :
Le pilote Sylvestre Floury, de Ploubazlanec avait pris la mer lundi matin [ 4 février 1884] . Ayant aperçu un grand trois-mâts dans les environs de l’île de Bréhat, il courut dessus pour faire au capitaine ses offres de pilote.
En approchant du navire, il ne remarqua rien d’anormal, il héla l’équipage. Pas de réponse. Alors il monta à bord, il s’aperçut à sa grande stupéfaction que le navire était entièrement abandonné. Depuis quand et comment, c’est ce qu’on n’a pas encore pu préciser.
Aussitôt informé, M. Le commissaire de l’inscription maritime se rendit à bord. De son enquête, il résulte que le navire se nomme Franz-Covacevich, du port de Syra, capitaine Mitrapoulos, chargé de froment de Bulgarie à ordre de Cork, Falmouth ou Plymouth.
La cargaison, qui parait en bon état, est évaluée à 6 ou 700 tonnes. Le port d’expédition est Varna. Le navire, nous l’avons dit, naviguait sous pavillon grec, mais tous ses papiers sont écrits en italiens Rien n’indique la cause de l’abandon du navire. Les bruits les plus invraisemblables circulent à Paimpol. On n’a aucune nouvelle de l’équipage.
On peut estimer le navire et la cargaison, au bas mot, à plus de 100 000 fr. C’est donc un véritable coup de fortune pour le pilote Floury. D’après la loi et les règlements, un tiers du corps et de la cargaison appartient au sauveteur d’épaves recueillies en mer.
Journal de Paimpol du 10 février 1884.
Un bel exploit de la part du pilote Sylvestre Floury de ramener avec son équipage réduit certainement à 3 hommes un trois-mâts de 500 tonneaux et de le mouiller en rade. En effet un sloup armé au pilotage a souvent en plus du pilote un matelot et un mousse ou un novice
Le journal le XIXème nous apporte les compléments suivants sur le navire : il avait un équipage de 11 hommes de plusieurs nationalités. Parti de Varna, il a fait escale à Constantinople et à Gilbraltar « d’où il était parti en patente nette le 15 janvier dernier ».
« Tout était en désordre à bord du navire. On suppose que l’équipage, pris de panique, a dû l’abandonner ou a été enlevé par la mer. Une seule de ses chaloupes, et c’est la plus petite, manquant à bord. Les pompes ne fonctionnaient plus ; l’équipage en avait établi une de fortune. »
Paimpol par Faudacq , le trois-mâts goélette représenté est nettement plus petit que le Franz Covacevich (Archives départementales des côtes d’Armor)
Le navire reste en rade de Paimpol quelques semaines puis est remorqué dans le port de Paimpol et attire de nombreux visiteurs.
« Le trois-mâts grec Franz Covacevich est entré dans notre port jeudi matin [6 mars 1884], remorqué par un vapeur anglais à roues, venu de Jersey à cette intention.
Depuis ce jour, ce navire est l’objet de visite continuelles de la part de nos concitoyens et des des nombreux étrangers venus à notre Foire-Neuve.
Jamais Paimpol n’avait vu un bâtiment d’un aussi fort tonnage. Nos goélettes islandaise ont l’air de chaloupes à côté de ce navire. »
Journal de Paimpol du 06 mars 1884
Le chargement de blé est rapidement vendu pour éviter toute détérioration Et quelques semaines plus tard le navire est mis en vente, le 25 mars 1884, sous la responsabilité du commissaire de l’inscription maritime de Paimpol : J. Hervé.. En voici L’annonce dans le journal de Paimpol.
Le titre de l’article suivant paru dans la presse de l’époque fait penser au des derniers corsaires sous le premier empire.
« Vente du navire grec capturé par le pilote Floury
Le 26 mars [1884], a eu lieu à Paimpol, la vente du navire grec Franz Covacevich. C’est un paimpolais, fondé de pouvoir, dit-on, qui s’est rendu adjudicataire pour la somme de 20 600 francs.
Le tiers de cette somme, soit 6,868 fr. revient au pilote Floury. Or, il a déjà touché 22 500 fr. pour cargaison du navire. Finalement il aura donc encaissé 29 368 Fr.
Un beau coup de filet auquel les pilotes de nos ports ne sont guère habitués. »
Journal L’indépendance Bretonne
L’histoire ne dit pas ce que le pilote Sylvestre Floury a fait avec cette petite fortune, ce qu’est devenu ce trois-mât ni si l’embarcation de l’équipage a été retrouvé !
Le bateau du pilote Floury était certainement comme ces sloups homardier de Loguivy vers 1900, un modeste bateau creux de 7 à 9 tonneaux.